Cet article a été publié en 2015. Si les explications sur la déflation restent valides, le contexte a évolué. Les taux négatifs ont fait leur apparition et la monnaie hélicoptère (une forme de Quantitative Easing pour les particuliers) n’est plus un sujet tabou. Gardez ces éléments à l’esprit en parcourant cet article.
L’Insee l’a annoncé le 19 février 2015, les prix à la consommation ont baissé sur un an (-0,4 %) pour la première fois depuis octobre 2009. Alors, inflation négative ou déflation ? Découvrez pourquoi les mots ont un sens.
Sommaire
L’examen du taux d’inflation depuis 1999 révèle qu’une baisse des prix d’une année sur l’autre est plutôt rare. Ainsi, elle n’a été observée qu’entre mai et octobre 2009 (6 mois) et en janvier 2015.
Indice des prix à la consommation(glissement annuel)
note : Le glissement annuel de l’inflation correspond à la croissance de l’indice mensuel par rapport à sa valeur 12 mois plus tôt.
Lorsqu’il se produit, le recul des prix est qualifié d’inflation négative ou de déflation. Or, ces deux termes ne sont pas équivalents et envoient deux messages fondamentalement différents. Pour comprendre la différence entre inflation négative et déflation, il est important de rappeler la définition de l’inflation. D’après l’Insee, l’inflation correspond à une augmentation générale et durable des prix.
Si l’inflation doit être maîtrisée car ses conséquences sont néfastes lorsqu’elle est trop élevée, une croissance équilibrée s’accompagne d’une légère inflation (positive). Ainsi, alors que le rôle de la BCE consiste à stabiliser les prix, elle s’efforce de stabiliser l’inflation aux alentours de 2 % (et non de 0 %).
Une baisse globale des prix peut provenir d’une baisse localisée de certains prix. Même si elle se prolonge quelques mois, il ne s’agira pas d’une situation de déflation. A l’instar de l’inflation, la déflation doit être générale et durable. En conséquence, un recul global des prix temporaire et provoqué par la baisse de certains prix ne correspond pas à une situation de déflation.
Comment nommer cette situation de baisse temporaire des prix ? En l’absence d’expression consacrée, l’oxymore « inflation négative » a été retenu. Le message véhiculé est alors clair : nous sommes toujours dans une dynamique d’inflation et son inscription en territoire négatif n’est que temporaire. Les anticipations d’inflation demeurent positives à moyen terme.
Si l’inflation négative est un « accident » sans gravité, la déflation est une plongée dans l’inconnu aux conséquences potentiellement destructrices. La déflation correspond à une situation de baisse généralisée et durable des prix qui débouche sur une spirale dont il est extrêmement difficile de sortir (le Japon s’y essaie sans succès depuis plusieurs décennies) :
Les dangers d’une spirale déflationniste
Le recul des prix qui a été observé en janvier 2015 devrait se prolonger sur le premier semestre. Comme en 2009 il s’explique essentiellement par la forte contraction des prix du pétrole. Comme en 2009, nous ne devrions donc pas tomber en déflation. Sauf que la situation économique de 2015 n’est pas celle de 2009 :
Inflation sous-jacente (glissement annuel)
note : L’inflation sous-jacente exclut les tarifs publics et les produits à prix volatils. Elle est corrigée des mesures fiscales et des variations saisonnières. Le glissement annuel de l’inflation correspond à la croissance de l’indice mensuel par rapport à sa valeur 12 mois plus tôt.
Dessine-moi l’éco : le Quantitative Easing
Si nous ne sommes pas (encore) en déflation, ce risque ne peut cependant pas être exclu. En conséquence, il est important de tout mettre en œuvre pour l’éviter. L’économie reposant sur les anticipations des agents économiques et leur confiance dans l’avenir, il faut à tout prix éviter que les agents économiques n’anticipent une baisse durable des prix. Il s’agirait en effet de la première étape de la spirale déflationniste.
L’utilisation du terme « inflation négative » doit donc être privilégiée. En limitant implicitement la baisse des prix à un phénomène temporaire, une incitation claire à consommer est envoyée : les prix baissent, profitez-en. En revanche l’utilisation du terme déflation véhicule l’incitation inverse : Attendez avant d’acheter, les prix vont continuer à baisser.
La qualification de l’épisode actuel de recul des prix n’est donc pas neutre. Lorsque le terme de déflation sera couramment utilisé, vous saurez que le Quantitative Easing de la BCE aura échoué et qu’une spirale déflationniste se mettra en place. Vous devrez alors agir en conséquence et protéger la valeur de vos actifs, à défaut de pouvoir sécuriser vos revenus professionnels.
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Titulaire d'un master en gestion de patrimoine et docteur en économie.